LETTRE AUX ELUS DU RHONE LE 1ER MARS 2002

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          Appel aux responsabilités de Mesdames et Messieurs les élus du département du Rhône,

 

 

            Nous sommes sapeurs pompiers professionnels, au service de nos concitoyens, et nous estimons aujourd’hui que la population de ce département n’a plus la sécurité qu’elle est en droit d’exiger.

En effet, les délais d’intervention des sapeurs pompiers augmentent régulièrement, les taux de couverture de leurs secteurs par les centres de secours sont au plus bas depuis 10 ans, et les demandes de secours d’urgence ainsi que les risques n’ont de cesse d’augmenter.

Depuis des années, on nous promet des effectifs supplémentaires, mais à force de racler les fonds de tiroir pour éviter les embauches nécessaires, on enlève des sapeurs pompiers de lieux où leur présence était indispensable, on détruit plus qu’on ne développe le service départemental d’incendie et de secours, on ne mutualise pas mais on demande encore et encore plus à une certaine catégorie de personnel déjà trop fortement sollicitée.(comparez les effectifs par centre il y a quelques années et croisez cette courbe descendante avec celle ascendante du nombre d’interventions par centre, le constat sera édifiant, croyez nous ! )

Encore cette année, pour combler le besoins d’emplois de SPP, ne serait-ce que pour respecter les  chiffres prévus dans le récent règlement opérationnel établi par le préfet, , on nous annonce 80 embauches, mais ces 80 postes sont à comparer aux départs vers d’autres départements de beaucoup de sapeurs pompiers et aux très nombreux départs à la retraite prévisibles ( plus de 250 pompiers peuvent prétendre partir en retraite ou demander le congé pour difficulté opérationnel dès cette année), ce qui fait que de toutes façons, les effectifs des centres n’augmenteront pas ! Et  nous n’arrivons pas à remplir le nombre d’équipes défini avec 4 hommes par entité, ce qui est pourtant indispensable pour armer correctement un VSAB ( = ambulances = 70 % des interventions)

Or, des sapeurs pompiers, il en faut , et hélas de plus en plus pour faire face aux exigences croissantes de la population en matière de secours, au développement des industries à risques (et au désengagement du privé de la sécurité), et à l’accroissement du nombre de sollicitations…

Egalement il faut savoir que nous avons l’impératif d’être sur les lieux en moins de 8 minutes pour avoir un maximum de chances de sauver une personne victime d’un arrêt cardiaque par exemple et que de toutes manières chaque minute, chaque seconde compte dans les secours d’urgence, et l’objectif du SDIS de 1995, qui était d’intervenir en moins de 10 minutes sur tout point de l’agglomération (ou 80% des interventions sont effectuées) sera impossible à tenir avec les effectifs prévus dans ce règlement, et carrément utopique dans le milieu rural, alors que l’objectif de la loi de départementalisation était de mutualiser, donc de rapprocher en matière de secours le milieu rural de la relative bonne desserte dont disposait alors le milieu urbain, mais sûrement pas de baisser la qualité de l’urbain, sans voir d’amélioration aucune de la couverture en milieu rural , voire pire !!!

Il faut donc rapidement tout revoir à la hausse, des vies sont en jeu. (combien de temps tiendriez vous pendu à un balcon ou dans la fumée ? 5- 10 – 15, c’est surement 20 minutes qu’il faudra attendre) car lors départs de secours, nous avons des choix à opérer entre un fourgon pour éteindre le feu, ou une échelle pour sauver les gens, tellement le nombre d’équipes disponibles est réduit !

Et les engins viennent alors de plus loin, avec les délais qui vont avec. On nous répond que le maillage est très bon en centre ville, mais nous, sur le terrain chaque jour, nous  répondons NON, car par exemple à 17h00 trouver rapidement un VSAB disponible sur son secteur est une chance pour la

victime, et armer un fourgon d’incendie et une échelle, base indispensable de toute attaque incendie est pratiquement impossible dès lors que les 2 ou 3 VSAB du centre concerné  sont engagés ce qui est le cas la majeure partie du temps et pour tous les centres urbains à longueur de journée !

Nous n’inventons rien , c’est réellement le cas, ce n’est certainement pas ce qui vous est décrit lors des « réunions », mais nous avons des dizaines d’exemples à vous donner par semaine, venez en parlez avec nous, sapeurs pompiers de terrain, vous entendrez alors un  son de cloche différent de ceux qui travaillent sur du papier statistique bien au chaud dans leurs bureaux et qui vous racontent le métier de sapeur pompier qu’ils croient connaitre! (sur 17 colonels dans le Rhône, 2 ou 3 maximum ont un jour tenu une lance et s’en souviennent ! et ils vous expliquent, vous narrent les interventions vues de leurs bureaux), alors nous sommes sûrs que vous apprendrez énormément de choses en prenant le temps de nous rencontrer et que vous pourrez dès lors conclure que la vision que l’on vous donne des SPP est faussée et que la situation est tout autre que celle décrite dans les statistiques.

 

Aujourd’hui l’heure est grave, vos sapeurs pompiers professionnels sont totalement démotivés de par les réformes irréfléchies qu’on leur impose trop vite, mais surtout par le fait de ne pas se sentir écouté, soutenus et de ne pas avoir de reconnaissance des instances dirigeantes et des élus représentants du peuple, mais plutôt un sentiment de MEPRIS, hélas quelquefois clairement affiché par certains !

En effet, de nombreuses modifications d’organisation, dont certaines rendues nécessaires par la parution récente de textes de portée nationale, sont venues modifier un système qui donnait majoritairement satisfaction jusque là.

Tout cela n’est pas encore digéré et nous en sommes loin tant le sous effectif est flagrant, alors comme cela est le projet, rajouter encore la dessus d’autres réformes totalement inadaptées, purement technocratiques, et encore une fois sans en mesurer les conséquences réelles à plus ou moins long terme, nous apparaît comme dangereux pour les équipes de secours (tant sur le point moral que physique) et sera très dommageable à la qualité du service public.

Nous n’accepterons pas :

-          de voir nos VSAB partir plus longtemps à 3 hommes,

-          de ne pas avoir de marge de sécurité avec des effectifs professionnels supplémentaires pour pallier aux absences inéluctables de sapeurs pompiers sur la garde du jour.

-          de voir s’installer la précarisation dans notre profession (qui a besoin au contraire de  sérénité, de sang froid…) avec l’embauche d’auxiliaires civils, intérimaires sous payés.

-          de constater un recours plus qu’abusif au volontariat dans des centres à très forte charge opérationnelle pour pallier au manque de  pompiers professionnels formés et entrainés pour cela.        Alors même que l’on constate une désaffection des volontaires car on leur en demande de plus en plus (formation, disponiblité…), et une raréfaction de SP disponibles en milieu rural (on ferait mieux dès lors de proposer à ces SP volontaires disponibles de prendre leurs gardes en journée là ou il manque des volontaires, dans les centres à moins forte sollicitation du département,  et d’embaucher des professionnels partout où un besoin permanent de SP en départ immédiat est justifié).

-          De constater des différences majeures de traitement entre tous les sapeurs pompiers (non accès pour tous aux choix des régimes de travail autorisés par le décret 2002-01, rémunération inégales…)

-          De constater la disparition de certains éléments nécessaires au bien-être d’un corps de SP dévoué tout entier à ses missions au service d’autrui ( restauration en centres de secours , chambrées affectées personnellement avec espace « privé » pour se ressourcer, etc…), surtout que les structures existent, suffisent et sont largement amorties.

-          De se voir refuser l’affectation pour ceux qui le désire des dizaines de logements disponibles  (réserve d’agents logés exploitable immédiatement en cas de gros coup type port édouard herriot, bus d’enfants qui se renverse sur l’autoroute,…) alors même que les textes établissent clairement que les SPP ont droit au logement (art. 5 décret 90-850).

Tout ceci ne fait pas partie de privilèges, mais d’éléments nécessaires au bon fonctionnement du corps de sapeurs pompiers, et serait la preuve d’une reconnaissance des élus donc des citoyens pour ceux qui au péril de leur chair parfois interviennent pour leur sécurité.

 

Le cumul de toutes ces réformes engagées ou à venir , ajouté au non respect systématique des avis des représentants du personnel, pourtant parfaitement conscients des risques et enjeux des mesures annoncées, fait qu’aujourd’hui nous tirons la sonnette d’alarme !

Nous ne comprenons pas que malgré des avis défavorables aux instances paritaires, tout soit voté sans discussions lors des séances du conseil d’administration ; Nous nous élevons contre ces votes décidés par le président seul, et adoptés en raison certes de contraintes budgétaires mais surtout à cause d’une vue occultée des réels enjeux, ce qui abaisse grandement  le niveau de la sécurité dans ce département.

 

Les très nombreux sapeurs pompiers CGT n’acceptent plus ce mode de fonctionnement, et nous avons pris la décision GRAVE de ne plus siéger aux instances paritaires du SDIS et de DEMANDER NOTRE DEMISSION alors même que nous avions été plébiscités puisque largement majoritaires lors des dernières élections professionnelles avec plus de 60% des voix en notre faveur.

 

Aujourd’hui l’heure est hélas une fois de plus à la crise mais puisque rien ne peut être discuté, revu, négocié, et que tout est ficelé d’avance, nous n’accepterons rien de plus, c’est déjà trop !

Nous avons un directeur par intérim depuis trop longtemps, il est à la source de chaque réforme et problème, il ne tient pas compte de ses hommes mais seulement de sa carrière, et dans ces conditions, nous avons décidé de nous faire entendre autrement.

Nous avions déjà rencontré avec toute l’union syndicale un grand nombre d’entre vous lors du dernier conflit relatif à la RTT, et avions été surpris de la méconnaissance et de l’image que certains d’entre vous aviez des SPP, mais grâce au dialogue, à votre écoute, nous avons senti la majorité d’entre vous réceptifs à nos attentes et à celles de la population que nous côtoyons tous les jours et sommes repartis assurés du soutien des représentants du peuple dans notre combat pour un service public de qualité qu’est en droit d’avoir la population.

Bien sûr,  cela à un coût et nous en sommes conscients ; Mais nous ne demandons pas la lune, simplement que perdurent des dispositions existantes, pour la plupart d’un coût très relatif, et que les effectifs soient enfin en rapport avec les risques, ce qui aura pour effet d’avoir à disposition 24h/24 des sapeurs pompiers professionnels formés, entrainés efficaces et motivés et prêts à tous les sacrifices pour la sauvegarde des personnes et des biens.

Nous estimons le moment venu de concrétiser toutes les belles paroles entendues ici et là et demandons que vous nous prouviez que vous êtes bien les élus du peuple, porteurs de la reconnaissance qu’à celui ci envers ses sapeurs pompiers, et que vous interveniez pour que cesse ce mode de fonctionnement anti-démocratique au sein du SDIS, que les  sapeurs pompiers soient enfin entendus, et nous souhaiterions vivement vous voir à nos côtés pour vous expliquer clairement la situation lors de nos prochaines actions dans la rue.

Nous apprécierions également que vous fassiez parvenir vos lettres de soutien demandant l’arrêt immédiat des réformes à monsieur le président du SDIS du Rhône 146 rue p corneille 69003 Lyon.

Nous sommes également disposé à vous rencontrer mais nous sommes certains que l’image d’élus aux cotés des sapeurs pompiers pour la défense des intérêts de ceux ci et du service public nous apparaît comme le meilleur moyen de temporiser les troupes et de remotiver vos sapeurs pompiers car nous vous l’assurons le désarroi est grand et la colère le sera tout autant si rien n’évolue rapidement!

Le bureau syndical CGT des sapeurs pompiers du service départemental d’incendie et de secours du Rhône

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